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La réforme territoriale (2/2) - Mardi 10 juin 2014
Comme promis dans la précédente revue de l'actualité concernant la réforme territoriale, j'ai développé un petit algorithme cherchant à minimiser les disparités économiques (de PIB) entre les régions françaises. En effet, la réduction de ces disparités constitue un des principaux arguments du gouvernement pour justifier cette réforme. Il est vrai qu'une des caractéristiques majeures des régions françaises (mais cela semble aussi le cas dans de nombreux pays européens) est leur inégal pouvoir économique. Par exemple, le PIB de l'Ile-de-France est évalué à 612 milliards d'euros, il est équivalent à 35 fois celui du Limousin (voir ici le document INSEE ayant servi à l'étude).

Pour minimiser les disparités économiques entre les régions françaises, faut-il encore pouvoir mesurer les inégalités. Pour cela, il existe plusieurs indicateurs statistiques. J'ai opté pour un indicateur très utilisé : le coefficient de Gini (ce choix doit être discuté). A partir de cet indicateur, il est possible de hiérarchiser les rattachements (les regroupements) de régions en fonction des inégalités. L'objectif est alors d'identifier les huit regroupements qui permettront d'obtenir le coefficient de Gini le plus faible possible. Pour cela, j'ai adopté une démarche d'optimisation qui fonctionne comme un algorithme glouton. Ainsi, la solution finale n'est pas obligatoirement « optimale », mais permet d'obtenir un coefficient de Gini « faible » qui pourra être comparé avec celui obtenus avec les choix du gouvernement.

Plus exactement, l'algorithme teste tous les regroupements possibles entre régions contigües et chaque regroupement se voit attribuer le coefficient de Gini correspondant. Le regroupement minimisant le coefficient de Gini est considéré comme optimal. L'algorithme ne remettra plus en question ce premier regroupement. Il est alors possible de passer au deuxième regroupement, puis au troisième et ainsi de suite. A chacune de ces étapes, la solution retenue est celle qui minimise le coefficient de Gini. Bien entendu, les régions doivent être contigües pour être regroupées et une nouvelle région ne peut regrouper plus de trois anciennes régions. L'algorithme s'arrête lorsque nous avons nos 14 régions. A noter que la Corse ne peut être rattachée à aucune région. L'algorithme produit la carte suivante :

image

Réforme territoriale troisième essai

Cette carte se rapproche de celle du gouvernement, faisant sans doute apparaitre le principal critère de cette réforme : la réduction des disparités économiques. En effet, on retrouve dans cette carte les rattachements du Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées, du Poitou-Charentes et du Centre, de la Haute-Normandie et de la Basse-Normandie, de la Picardie et de la Champagne-Ardenne, de la Lorraine et de l'Alsace. Une fois encore les régions Bretagne et Pays-de-la-Loire ne sont pas rattachées. Néanmoins, la création de l'improbable Bourgogne-Limousin-Auvergne vient un peu perturber la donne. Les régions Franche-Comté et Bourgogne se voient alors séparées, tout comme l'Auvergne et le Rhône-Alpes.


Le coefficient de Gini obtenu avec ces regroupements est de 0,318 (hors Corse), tandis que le coefficient de Gini obtenu avec les regroupements du gouvernement est de 0,347 (hors Corse). Ainsi, l'algorithme développé permet bien d'obtenir une disparité économique moins importante.

Pour conclure avec cette réforme territoriale, il semble bien que la réduction des disparités économiques ait été un critère important. L'ensemble des cartes produites tend finalement à confirmer un nombre important des choix du gouvernement si l'on fait exception des critères historiques et culturels (qui ne sont pas pris en compte dans les analyses menées). Même les décisions les plus contestées peuvent être justifiées. Ainsi, le rattachement de la Loire Atlantique et de la Bretagne n'a rien d'évident. L'étonnant rattachement de la Picardie et de la Champagne-Ardenne n'est pas aberrant. Le rattachement des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon peut être justifié d'un point de vue économique, même si la région Languedoc-Roussillon entretient des relations domicile-travail importantes avec la région PACA. In fine, le seul rattachement contestable sur toutes les cartes est celui de la Franche-Comté et de la Bourgogne qui n'a pourtant rien de surprenant surtout d'un point de vue universitaire.

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