Dans les jours qui suivent un scrutin électoral, il est toujours intéressant d'en analyser les résultats. S'il existe un certain nombre de sites internet permettant d'obtenir dès le lendemain du scrutin les résultats relatifs à sa commune, je perds souvent beaucoup de temps sur ces sites pour en analyser les résultats. En effet, sur ces sites, je n'ai malheureusement pas la possibilité d'avoir accès rapidement à une carte synthétique des résultats pour l'ensemble des communes voisines de la mienne dont les résultats m'intéressent. Dans les faits, les élections constituent des cas d'étude parfaits permettant d'illustrer l'utilité de la « discrétisation multivariée » qui reste rarement utilisée par les médias français (je ne sais pas ce qu'il en est dans les autres pays).
Je m'explique. Si certains journaux publieront des cartes avec les résultats électoraux dans les jours qui suivent un scrutin, ces cartes concerneront un parti en particulier (ou éventuellement des regroupements de partis). Ainsi, si le FN (RBM) réalise un « gros score », vous pouvez être sûr que des journaux publieront des cartes représentant les scores du FN (RBM) dans différentes communes, différents départements ou différentes régions. Puis, le lendemain, les cartes seront consacrées aux scores des « partis de gauche » qui auront subi une « lourde défaite ». Néanmoins, ces cartes ne permettent pas d'obtenir la vision synthétique souhaitée. Notre cerveau est ainsi fait qu'il aura du mal à synthétiser les résultats représentés sur plusieurs cartes, le nombre de cartes pouvant être égal au nombre de partis (environ 50 partis pour 193 listes aux élections européennes de 2014 !).
Le mardi soir suivant les élections européennes de 2014, j'ai donc fait tourner un petit robot sur le site du monde.fr (j'espère que les webmasters ne m'en veuillent pas trop, car ça ne se fait pas.), pour récupérer les résultats du scrutin dans l'ensemble des communes d'Ile-de-France (les résultats officiels n'étant alors pas encore publiés). Passé ce petit obstacle pour récupérer les données, je disposais des résultats pour les six partis ayant réalisés les meilleurs « scores » : FN (RBM), UMP, UDI-MODEM, PS, VERTS, PG. Le jeudi de l'assomption, j'ai alors pu utiliser la fonction « Clustering » de l'extension d'analyse spatiale que j'ai développé sous QGIS (extension ici, complément de cours ici). J'ai choisi un nombre arbitraire de six classes, une distance euclidienne et une méthode de Ward (ces choix doivent être discutés !). J'ai alors obtenu la carte suivante.
Résultat des élections européennes 2014
Classe 1 (orange) : Très gros score du FN (RBM). L'ensemble de la gauche et le centre écrasés (environ 20% des voix au total).
Classe 2 (vert) : Fort score du FN (RBM).
Classe 3 (jaune) : Fort score de l'UMP et bon score du centre.
Classe 4 (rose) : Résultat « acceptable » pour l'ensemble de la gauche grâce notamment au PG.
Classe 5 (rouge) : Résultat proche de la moyenne avec cependant le FN (RBM) limité à 20% et les « grands » partis qui n'en bénéficient pas.
Classe 6 (bleu) : Résultat proche de la moyenne avec cependant un faible total pour l'ensemble de la gauche dont le FN (RBM) profite.
En matière d'analyse spatiale, la carte synthétique produite montre clairement les fortes « performances » du FN (RBM) dans les communes périurbaines de l'Ile-de-France (en orange, en vert et dans une « moindre mesure » en bleu).On constate aussi la présence d'un certain clivage est/ouest en petite couronne où « la gauche » « limite la casse » dans le nord-est et où l'UMP dispose toujours de « bastions » au sud-ouest. Plus généralement, cette carte fait apparaitre assez nettement la « résistance » à la poussée du vote FN (RBM) de certains bastions UMP de l'ouest parisien. Enfin, cette classification met en exergue la difficulté pour les partis de gauche, comme pour le parti centriste, à faire de « bons scores » (supérieurs à 20%). Combien de cartes aurait-il fallu pour arriver à ces conclusions sans cette discrétisation multivariée ?
Retour page d'actualités